Une déambulation photographique au cœur des cortèges de manifestations. À travers un corpus de photographies réalisées entre les années 70 et aujourd’hui, Ils furent foule soudain célèbre une iconographie des manifestations à travers le monde. En réponse à une carte blanche d’Amnesty International, dans le cadre de sa campagne mondiale sur le droit de manifester, vingt photographes de l’agence MYOP se réunissent pour dire ensemble la force des manifestations et ce qu’elles peuvent parfois permettre. Ils furent foule soudain réunit dans un superbe format à l’italienne un corpus de 100 photographies en reproduction couleur et noir et blanc, augmenté de 4 textes de l’un des écrivains les plus célèbres et engagés du monde arabe, Alaa El Aswany, et préfacé par Salomé Saqué, journaliste spécialisée sur les sujets de l’urgence climatique, la justice sociale, l’égalité femmes-hommes et la jeunesse.
Les photographies rassemblées ici sont des fragments de colère, d’espoir et de détermination. Elles racontent des combats qui traversent les époques, des visages qui, il y a cinquante ans comme aujourd’hui, refusent de détourner le regard. Toutes les mobilisations n’aboutissent pas à des bouleversements de société, mais elles partagent toutes cette même étincelle : un refus de céder à la résignation. Je crois que c’est le propre des soulèvements : on ne les voit jamais venir.
Salomé Saqué
« Ils n’étaient que quelques-uns / Ils furent foule soudain »
Ce sont sur ces vers de Paul Éluard* qu’Amnesty International et l’agence MYOP se rencontrent pour témoigner ensemble de la puissance des manifestations : des sentiments qu’elles procurent aux changements qu’elles permettent, de la pluralité des combats dont elles attestent à la clameur collective qu’elles transmettent.
À travers ce livre, l’élan des mobilisations est porté par une combinaison de gestes. Ceux des manifestant·es d’un côté et ceux des photographes de l’autre, qui in fine ne font plus qu’un, pour délivrer le même récit. Les personnes qui manifestent ont autant la conviction d’être à leur place, ici – pour revendiquer -, que les photographes ont la conviction d’être à leur place, là – pour documenter, informer, raconter.
Si nous avons tendance à vouloir dénoncer ce qui nous choque, nous déplaît, nous sidère ou nous met en rage, c’est en manifestant que la revendication individuelle se mue en revendication collective.
Manifester nous anime.
Manifester nous engage.
C’est un réflexe irrépressible : un acte universel de résistance et de solidarité.
Le droit de manifester pacifiquement doit s’exercer sans entrave. Or, il est trop souvent contesté et réprimé. Parce qu’il est essentiel et qu’il en protège d’autres, il doit sans cesse être défendu.
Manifester se transmet de génération en génération, en vue de changer le cours de l’avenir. Des générations qui se battent pour toujours plus de dignité, d’égalité, de liberté et d’humanité. Et si on les écoutait ?
*Faire vivre, 1944