Livre Épuisé.
Exemplaire Signé.
1ère édition tirée à 550 exemplaires en français et 350 en anglais dont 50 ex. avec un tirage original.
Édition Collector avec un tirage original ici
Dès le premier jour du confinement consécutif à l’épidémie de Covid-19, Antoine d’Agata a parcouru les rues de Paris avec un appareil thermique pour enregistrer, à sa manière, l’épisode viral qui a fait de la ville un étrange théâtre d’âmes errantes, de têtes baissées et de corps fuyants. C’est comme « agent de contamination » qu’il s’est engagé dans l’expérience ouverte par l’épidémie et le confinement. D’abord attiré par la façon dont cet appareil thermodynamique enregistre les rayonnements infrarouges (ondes de chaleur) émis par les corps et qui varient en fonction de leur température, il a vite été fasciné par un processus qui réduit les sujets humains à des figures essentielles, dénuées de caractéristiques ou spécificités superflues.
Installé deux mois durant dans les bureaux de l’agence Magnum à Paris, il a utilisé la technique thermique pour rendre compte de l’imprégnation de la ville désertée dans le confinement : ville plongée dans le silence, traversée par des corps aux attitudes stéréotypées, habitée surtout par les sans- abris qui apparaissent, à l’image, comme les derniers corps véritablement vivants et résistants, les compositions austères et teintées de flammes offrant une vision alternative et dystopique des rues qui se vident.
« Ce travail documentaire est dominé par l’utilisation de la technologie thermique car elle offre la capacité de capturer des informations auxquelles la photographie telle que nous la connaissons n’a pas accès. Il n’est pas question d’esthétique mais d’une technique qui me permet de générer un langage visuel qui appréhende la réalité de « la vie nue » dans une perspective à la fois sensorielle, politique et existentielle.
Alors que le coronavirus déchirait le continent et que les populations s’isolaient, nourri de quelques mots d’Henry James cités par Jean-Luc Godard – Nous travaillons dans le noir – nous faisons ce que nous pouvons – nous donnons ce que nous avons. Notre doute est notre passion et notre passion est notre tâche – j’ai traqué la chaleur emmagasinée par les corps, dans la rue d’abord, puis très vite dans les unités de soins continus et de réanimation Covid-19. J’ai produit ces deux derniers mois 13 000 images (6 500 dans les rues de la capitale, 6 500 dans divers hôpitaux) dormant parfois des jours durant au sein même des structures hospitalières, photographiant les interactions entre docteurs, infirmiers, aides-soignants, ambulanciers et patients, les gestuelles et rituels médicaux, de soins, d’hygiène ou de confort. C’est cette ambivalence entre solidarité et contamination, cette inéluctabilité de la mort sociale et de la mort physiologique que j’ai tenté d’appréhender, à travers un langage des sens et de la résistance qui transfigure les corps, l’image thermique faisant surgir des formes, des postures, des figures, des courbes, des zones imperceptibles à l’œil nu ; textes de Mehdi Belhaj Kacem, Mathilde Girard, Philippe Azoury, Léa Bismuth, Juan Branco, Yannick Haenel, Frédéric Neyrat, photos en couleurs.
Publié à l’occasion de l’exposition à la Fondation Brownstone à Paris présente une installation de 1111 photographies réalisées par Antoine d’Agata entre le 10 et le 30 Octobre 2020 (Prolongée jusqu’en novembre 2020 et/ou à la ré-ouverture publique)
VIRUS est le nouvel opus d’une expérience photographique née de ma nécessité de prendre part à une situation d’exception sanitaire depuis une position intensive mais vouée, à court terme, à rendre compte des symptômes et aboutissement d’une crise économique et sociale inéluctable. C’est par le décryptage de rapports de force qui découlent de logiques économiques en pleine mutation, et à l’aide de stratégies esthétiques expérimentales que j’ai voulu faire apparaître comment les corps résistent à leur domestication capitaliste et à la surveillance intégrale des conduites. Le chemin photographique épouse la chronologie des événements économiques à venir, en soulignant les grandes séquences d’une évolution qui pourrait être brutale. Soucieux des enjeux psychiques et politiques de l’évolution de la pandémie, je poursuis avec la même obstination l’élaboration d’un atlas intime. Car l’existentiel n’est jamais réductible à des gestes, mais ne se saisit amplement que dans un acte plus grand : celui de l’artiste qui veut tout, et s’en donne les moyens. Le caractère sériel et futuriste des corps domestiqués par le quotidien du confinement se trouvant accentué et dénoncé par la cruauté des faits que les images consignent. » Antoine d’Agata
From the first day of confinement ensuing the outbreak of the Covid-19 epidemic, Antoine d’Agata roamed the streets of Paris with a thermal camera to record, in his own unique way, the viral epidemic that turned the city into a strange theatre of wandering souls, bowed heads and fleeing bodies. Initially attracted by the way in which the thermodynamic device records the various infrared rays (heat waves) emitted by bodies, which vary according to their temperature, the artist was soon fascinated by a process that reduces human subjects to essential figures, devoid of superfluous characteristics or specificities.
Living and working for two months out of the Paris office of the Magnum Photos agency and gallery, he used the thermal technique to document the impregnation of the deserted city existing under confinement: a city plunged into silence, traversed by bodies with stereotypical attitudes, inhabited above all by the homeless who appear – in these images – as the last truly living and resistant bodies, austere and flame-tinged compositions offering an alternative and dystopian vision of the emptying streets.
« This documentary work is dominated by the use of thermal technology because it offers the ability to capture information that photography as we know it cannot. It is not a question of aesthetics but of a technique under development that allows me to generate a visual language that apprehends reality from both an existential and political perspective.
As the coronavirus tore the continent apart and people isolated themselves, I was fed by words from Henry James quoted by Jean-Luc Godard – We work in the dark – we do what we can – we give what we have. Our doubt is our passion and our passion is our mark – I tracked the heat stored by bodies, first on the street and then – very soon after that – in the Covid-19 continuing care and resuscitation units. In the last two months I produced 13,000 images (6,500 in the streets of the capital, 6,500 images in various hospitals) sometimes sleeping for days on end within the hospital buildings, photographing the interactions between ambulance drivers, doctors, nurses, and patients – gestures spanning the medical, hygienic, and comforting.
It is in this ambivalence between solidarity and contamination, this inevitability of social and physiological death, that I tried to apprehend, traversing a language of senses and of resistance that transfigures the body. The thermal image freezes forms, postures, figures, poses, zones imperceptible to the naked eye.
Published at the occasion of the exhibition will present an installation of 1111 images produced by Antoine d’Agata between Octobre 10 and 30, 2020.
VIRUS is the new opus of a photographic experience born from my need to take part in a situation of emergency from an intensive position but doomed, in the short term, to account for the symptoms and outcome of an inescapable economic and social crisis. It is through the deciphering of unprecedented power relations resulting from changing economic logics, and with the help of experimental aesthetic strategies, that I wanted to show how bodies resist their capitalist domestication and the integral surveillance of behaviours. The photographic path follows the chronology of the economic events to come, underlining the great sequences of an evolution that could be brutal. Concerned by the psychic and political dimension of the evolution of the pandemic, I continue with the same obstinacy to perfect an intimate atlas. For the existential is never reducible to gestures, but is only amply grasped in a larger act: that of the artist who wants everything, and gives himself the means to gain it. The serial and futuristic character of the bodies domesticated by the daily routine of confinement being accentuated and denounced by the cruelty of the facts that the images record.” – Antoine d’Agata