“Ce récit entrelace habilement journal intime, chronique, dans toutes sortes de diégèses avec pour fil conducteur le parcours initiatique d’un adolescent savoyard devenu photographe affirmé ayant produit sept livres de photographies, et beaucoup d’autres traitant de sujets aussi arides que savants.
C’est aussi au hasard des rencontres dans le monde de la photographie, l’occasion pour Bernard Just de nous livrer des portraits pleins de tendresse où s’il lui arrive d’embellir la réalité comme il le confesse, ce n’est jamais pour se donner le beau rôle. On y croise son complice Philippe Salaün facétieux comme un korrigan avec ses amis et digne comme un cheval d’orgueil dans son métier. Je ne trouve pas l’équivalent français de candid photography pour désigner le travail d’Yvette Troispoux. Candide et spontanée, elle l’était autant dans ses prises de parole que dans ses prise vues. Jean-Philippe Charbonnier avait observé qu’après avoir fait la mise au point avec le télémètre de son Leica, elle reculait de trois pas avant de déclencher, et que la photo était nette. Sacrée Yvette!
Sont évoqués aussi Daniel Lebée si insoucieux de tout ce qui n’est pas jazz et Sabine Weiss la malicieuse qui nous aura appris que la lumière de nuit est aussi belle que celle de jour pourvu que l’on aime la vie. Et, peut-être, la plus belle page, celle consacrée à Claude Batho. Et encore beaucoup d’autres, mais bien campés!
Alors évitions la proxilité.
Avec humilité, Bernard Just nous conte comment chaque rencontre fut une leçon glanée çà et là, une anecdote, un tour de main, un truc de métier appris.
Avant les années 70, presque tous les photographes évoquent le même souvenir “On m’a offert un appareil quand j’étais adolescent” C’est le cas de Bernard Jus, de Weston, de Charbonnier, de Sieff… (je cite de mémoire).
A partir des années 80, ils disent plus souvent “Je me suis mis à la photo après avoir découvert l’œuvre de tel artiste dans une exposition”.
C’est que dans les années 70 la photographie a vécu une formidable éclosion en France. Souvenez-vous:
1970 création des Rencontres d’Arles, 1971 création de la Galerie de photographie de la BN, 1972 création de la Photogalerie salon de thé avec lieu d’exposition, création du musée Nicéphore Niépce à Chalon-sur-Saone avec le merveilleux Paul Jay comme conservateur, ouverture du bistrot de Montmartre cher aux photographes par Nicole et Léon Hershtritt, 1973 installation du stage expérimental de Claudine et Jean-Pierre Sudre à Lacoste, 1974 création de la Galerie du Château d’Eau à Toulouse par Jean Dieuzaide, 1975 création de la Galerie Agathe Gaillard, 1976 nomitaion d’Agnès de Gouvion Sain-Cyr au Ministère de la culture chargée de la photographie, 1977 création de la Galerie Zabrizkie, 1978 création de la Galerie Octant par Alain Paviot, création de la Fondation Nationale de la Photographie à Lyon, création de Paris-Audiovisuel avec Jean-Luc Monterosso, 1979 création de la Galerie Viviane Esders…
C’est dans ce bouillonnement que Bernard Just arrive à Paris, malheureux d’avoir quitté ses alpages, mais comme Frédéric Moreau de Flaubert, surtout exalté par la découverte, l’observation, la contemplation de Paris.[…] -extrait de la préface de Michel Kempf.
Bernard Just est né en 1949. Il reçoit son premier appareil photo en bakélite à l’âge de 13 ans. Au lycée, il découvre la magie de la chambre noire en cours d’art plastique. Il s’achète son premier appareil 24×36. En photographe passionné, il adhère au club Photographique de Paris, « les 30×40 ». Durant cette période, il a rencontré de nombreux photographes dont certains très célèbres. Il nous livre ici ses souvenirs et ses émotions ; quelques photos en n.b.