1ère édition tirée à 89 exemplaires.
Le voyage auquel nous invite Pierre Gély-Fort a plus en commun avec un cauchemar qu’une expérience agréable.
Sur ce paquebot de croisière aux allures de bunker, les passagers ressemblent à des condamnés piégés dans un faux environnement, où l’ennui et la satiété sont monnaie courante.
Les voyageurs s’abandonnent avidement aux selfies, ignorant parfaitement que l’environnement ressemble à un décor de scène en carton, un miroir opulent qui sert à refléter la réussite sociale et le bonheur matériel.
Le navire est si immense qu’il occulte complètement tout le champ de vision. On ne voit rien du paysage extérieur, apercevant à peine un morceau de ciel ou de mer. Comme Patrick McGoohan dans The Prisoner, l’île-prison qu’est ce paquebot est le seul endroit dans lequel les occupants ont le loisir de flâner, de contempler et de consommer.
Pour ces voyageurs, les rêves de toute autre nature apparaissent non seulement comme interdits mais aussi vains. Sur ce navire, où l’échelle pure anesthésie tout hors écran, les passagers semblent renoncer à leur individualité en embarquant, pour s’inscrire dans le moule d’une classe privilégiée. La seule condition est d’être heureux!
Au-delà de leur apparente innocuité, les photographies de Pierre Gély-Fort offrent un regard sans compromis sur un monde où tout contribue à réduire l’être humain au rang de consommateurs naïfs et serviles.
A l’opposé d’un reportage photo-journalistique, et comme doté d’un scalpel, Pierre dissèque minutieusement sa vision très personnelle d’une pâleur incandescente. Abandonnant la couleur qui caractérisait ses premiers voyages poétiques dans des contrées lointaines, il a ici opté pour un noir et blanc radical, très contrasté, presque clinique.
Le but ici n’est pas de magnifier ou d’humaniser l’histoire, mais plutôt de démystifier cette expérience de croisière, agréable pour certains, sans doute, mais évocatrice de poissons piégés dans un bol. -Paulo Jorge Lobo (journaliste et photographe)
The voyage that Pierre Gély-Fort invites us on has more in common with a nightmare than a pleasurable experience.
On this bunker-like cruise liner, the passengers resemble convicts trapped in a fake environment, where boredom and satiety are rife.
The travelers greedily give themselves over to selfies, blissfully unaware that the surrounding environment resembles a cardboard stage set, an opulent mirror that serves to reflect social success and material happiness.
The ship is so immense that it completely occults the entire field of vision. We see nothing of the outside landscape, barely glimpsing a piece of sky or sea. Like Patrick McGoohan in The Prisoner, the prison island that is this ocean liner is all that the occupants have the leisure of strolling, contemplating, and consuming.
For these travelers, dreams of any other kind appear not only as forbidden but also futile. On this ship, where the sheer scale anesthetizes everything off-screen, the passengers seem to renounce their individuality upon embarking, in order to fit into the mould of a privileged class. The only condition is to be happy!
Beyond their apparent innocuousness, Pierre Gély-Fort’s photographs offer an uncompromising look at a world where everything contributes to reducing human beings to the rank of naïve, servile consumers.
At the opposite extreme of a photo-journalistic report, and as if endowed with a scalpel, Pierre painstakingly dissects his very personal vision of an incandescent pallor. Abandoning the color that characterized his earlier poetic journeys to distant lands, here, he has opted for a radical black and white that is highly contrasted, almost clinical.
The aim here is not to magnify or humanize the story, but instead to demystify this cruise experience, enjoyable for some, undoubtedly, but evocative of fish trapped in a bowl. -Paulo Jorge Lobo (Journalist & photographer)