On ne peut qu’imaginer à quel point il aurait été époustouflant d’assister à l’arrivée des premières automobiles en Chine. Il y a plus d’un siècle, les citadins et les agriculteurs ordinaires ont dû arrêter tout ce qu’ils faisaient pour admirer le véhicule mystérieux qui se déplaçait apparemment sans effort humain. Certains ont dit qu’elle était motivée par des « mauvais esprits ». Mais ils ont ensuite dit la même chose au sujet de l’invention de l’appareil photo et de son miroir magique il y a des années. D’autres, avec un sens de l’humour légèrement meilleur, l’ont appelé une « maison étrangère » ou même plus spirituel, un « panier à pets ». Pour la fumée noire qui se dissout invariablement dans l’air derrière elle.
C’est une erreur commune cependant de croire qu’au début des années 1900, la population chinoise était hostile aux produits étrangers ou à la modernité. D’une manière générale, ils ont adopté avec enthousiasme les nouvelles tendances qui ont ensuite été tissées de manière pragmatique dans le tissu de la vie quotidienne. Les importations de luxe ont été utilisées par les élites comme preuve visuelle du statut social, tandis que les imitations bon marché satisfaisaient la demande de nouveaux produits parmi les gens ordinaires : les deux étaient absorbés dans une culture qui, sans le tangible, désirait le nouveau. [1]
À Hangzhou, par exemple, de grandes foules se sont émerveillées devant des diaporamas photographiques montrant que « les yeux peuvent emmener le public à de nombreux endroits ». La ville avait des dizaines de photographes. Les gens ordinaires pouvaient faire leur portrait en noir et blanc tandis que ceux qui avaient plus d’argent avaient le leur méticuleusement teinté à la main. À l’intérieur du studio photo, Des efforts ont été faits pour recréer une atmosphère moderne avec des paysages peints et des avant-plans des dernières machines à la mode. Des premières motos dans les années 1940, aux réservoirs dans les années 1950, aux avions dans les années 1960 et aux télévisions dans les années 1980, l’engouement pour les nouvelles technologies s’est avéré être une habitude culturelle continue qui peut encore être ressentie aujourd’hui.
Cet album se compose de 35 photographies que j’ai recueillies sur des marchés d’antiquités et sur des sites Web en Chine au cours de la dernière décennie. Les graphismes colorés sont copiés d’un album produit dans les années 1960 qui propose une visite historique le long des rives du célèbre lac de l’Ouest. Les portraits capturent l’attrait futuriste des machines comme les voitures, les avions ou les téléviseurs. Comme l’invention d’Internet, du smartphone ou du vélo électrique au cours des dernières décennies, la plupart des innovations se glissent lentement dans le présent commun. -Ruben Lundgren
We can only imagine how mind-blowing it would have been to have witnessed the arrival of the first ever automobiles in China. Over a century ago, city folk and ordinary farmers must have stopped whatever they were doing to admire the mysterious vehicle which moved seemingly without human effort. Some said it was driven by ‘evil spirits’. But then, they had said the same about the invention of the camera and its magic mirror years before. Others, with a slightly better sense of humour, called it a ‘foreign house walking’, or even wittier, a ‘fart cart’, for the black smoke that invariably dissolved into the air behind it.
It’s a common mistake however to believe that by the early 1900s, the Chinese population was hostile towards foreign products or modernity. Generally speaking, they enthusiastically embraced new trends that were then pragmatically woven into the fabric of everyday life. Luxury imports were used by elites as visual evidence of social status, while cheap imitations satisfied the demand for new products among ordinary people: both were absorbed into a culture that without the tangible and craved the new. [1]
In Hangzhou for example, large crowds at the West Lake marveled at photographic slide shows demonstrating that ‘the eyes can take the audience to many places’. By the 1930s, the city had dozens of photographers. Ordinary people could have their portrait taken in black and white while those with more cash had theirs painstakingly tinted by hand. Inside the photo studio, efforts were made to recreate a modern atmosphere with painted landscape backgrounds and foregrounds of the latest machinery in fashion. From the first motorcycles in the 1940s, to tanks in the 1950s, planes in the 1960s and televisions in the 1980s, the eagerness for new technology has proven to be a continuous cultural habit that can still be felt today.
This album consists of 35 photographs I collected at antique markets and via websites in China over the past decade. The colourful graphics are copied from an album originally produced in the 1960s which offers a historical tour along the banks of the famous West Lake. The portraits capture the futuristic appeal that machines like cars, planes or televisions once had. Like the invention of the internet, smartphone or e-bike in recent decades, most innovations slowly slip away into the common present. -Ruben Lundgren
[1] Frank Dikötter, Exotic Commodities, Modern Objects and Everyday Life in China, Columbia University Press, New York, 2006