Le Liban fait partie de mon histoire familiale : mes grands-parents, partis de leur village de Kharpet au début du XXe siècle, sont passés par Alep, puis Beyrouth et sont arrivés à Marseille. Cette série a été réalisée entre 2016 et 2020, suite à plusieurs séjours au Liban. Le fil, les fils sont omniprésents dans le paysage : les fils électriques s’imposent sur les murs et courent au-dessus des têtes ; les fils ont le sens aussi de la filiation. Certaines de ces images ont été retravaillées, brodées aux fils d’or et argent : le quartier de Burj Hamud est un quartier marqué par la présence d’artisans joaillers et du textile. Broder c’est un peu comme révéler… ou réparer.
Burj Hamud se situe de l’autre côté de la rivière et de la voie rapide Gemayel, à l’est de Beyrouth. C’est un quartier arménien avec des Arméniens mais aussi des Palestiniens, des Syriens, des Africains. Un quartier que j’ai arpenté et arpenté depuis 2016, pas seulement les rues d’Arax ou Marash mais aussi les rues adjacentes, là où l’on se perd. Ce quartier est un condensé de ce qu’est le Liban : un territoire aux identités plurielles, ayant traversé toutes les catastrophes, guerres, crises, explosions, un quartier désespéré et résilient à la fois, un condensé des paradoxes libanais. Il me fallait des noirs, des gris pour dire mon regard sur les murs à la recherche des traces qui font le récit, comme si c’était la fin d’une histoire, ou le début d’une autre. Une histoire de point de vue. -Brigitte Manoukian ; textes de Grégory Buchakjian, Thierry Fabre, photos en n.b.