Cet essai aborde la photographie à partir des clichés habituellement considérés comme anecdotiques, marginaux ou sans valeur. Il confronte l’amateurisme des pratiques photographiques entre la fin du XIXe siècle et la fin des années 1960 à l’histoire communément admise de la photographie, remettant en question ses frontières.
Quoi de commun entre un photographe qui essaye de capturer des fantômes, un expérimentateur qui tente d’enregistrer ses pensées en disposant une plaque sensible sur son front, un opérateur de fête foraine, un prestidigitateur en chambre noire, de joyeux amateurs et quelques chasseurs de reflets ? Rien, si ce n’est leur appartenance à cette vaste catégorie photographique encore insuffisamment étudiée par les historiens du médium : celle du vernaculaire.
La photographie vernaculaire est le plus souvent appliquée ou fonctionnelle, c’est-à-dire utilitaire. La famille est l’un de ses principaux lieux de production ou de circulation, elle est donc aussi domestique. Mais surtout, elle se situe hors de ce qui a été jugé le plus digne d’intérêt par les principales instances de légitimation culturelle.
Elle se développe en périphérie de ce qui fait référence, compte et pèse dans la sphère artistique. Elle est l’autre de l’art. En historien consciencieux, mais non sans délectation, Clément Chéroux revient dans cet ouvrage sur quelques- unes de ces pratiques vernaculaires oubliées. Elles deviennent autant d’occasions d’interroger la photographie : faut-il (ou non) croire aux images, comment s’aveugler en les regardant, qu’est-ce qu’un amateur, quel est l’inconscient photographique du cinéma de Georges Méliès, les photographes forains ont-ils le pouvoir de changer la vie en changeant de décor, quelle était la véritable activité d’Eugène Atget ? ; photos en noir et blanc.