Publié à l’occasion de l’exposition à la Maison de la Photographie de Gentilly du 22 novembre 2019 au 9 février 2020.
André Kertész (1894-1985) compte parmi les regards qui ont ouvert des chemins nouveaux dans la photographie du Xxe siècle. Son œuvre a été léguée à l’État en 1984 sous la forme d’une archive contenant la totalité de ses négatifs, dont pour moitié des bandes au format 24 x 36 mm témoignant de l’adoption précoce par le photographe d’un appareil portatif, le Leica. Avec cet appareil novateur qu’il est l’un des premiers à apprivoiser, Kertész s’est progressivement ouvert à de nouvelles postures et à de nouveaux enjeux photographiques, laissant derrière lui des images qui ont marqué longuement les photographes des générations suivantes.
Trois parties structurent la lecture et guident le regard à travers les images. L’ouvrage commence par attentivement regarder le négatif, en détaillant l’ensemble des manipulations techniques, des sélections éditoriales, des réflexions esthétiques, des décisions institutionnelles et finalement des recherches historiques il est le support concret.
Nous découvrirons également les précieuses indications historiques que renferment les marges de ses pellicules et rétablirons au passage la chronologie perdue de sa production parisienne.
La seconde partie s’attache à décrire les enjeux techniques, esthétiques et relationnels de la démarche du photographe. Elle observe plus précisément comment Kertész s’est délibérément employé à trouver un juste équilibre entre l’héritage descriptif des artisans de la chambre photographique du XIXe siècle, les apports esthétiques de l’avant-garde contemporaine, et les préoccupations médiatiques nouvelles du reportage, dont il est l’un des principaux initiateurs.
Enfin, nous analyserons pourquoi Kertész, en se souciant davantage de la persistance que de l’éphémère, ne se reconnaît pas dans la notion d’instant décisif. Nous prendrons le temps de comprendre en quoi la précaution d’ensemble dont témoignent ses images participe d’une lucidité médiatique par laquelle il s’écarte consciemment des évolutions professionnelles de son temps.
Finalement la portée de son geste photographique nous apparaîtra comme le désir de transformer le spectateur en regardeur ; textes de Cédric de Veigy et Matthieu Rivallin, photos en n.b.