Thatcher’s Children, un projet à long terme du photographe Craig Easton, examine la nature intergénérationnelle de la pauvreté vécue par trois générations de la famille Williams dans le nord de l’Angleterre. Le passage du temps montré dans le livre montre comment la privation est liée aux échecs de la politique sociale des gouvernements successifs.
Thatcher’s Children est né d’une série créée en 1992 et mettant l’accent sur deux parents et six enfants vivant dans une auberge pour familles sans abri à Blackpool, en Angleterre. Le projet a été réalisé en réponse à un discours de Peter Lilley, alors secrétaire d’État à la Sécurité sociale, dans lequel il a annoncé sa détermination à « fermer le quelque chose. »Le journal Libération envoya un journaliste dans le nord de l’Angleterre pour découvrir à quoi ressemblait cette société, et Craig Easton fut chargé de prendre les photographies qui l’accompagnaient. Ses images monochromes de l’appartement surpeuplé de deux chambres du conseil à Blackpool ont suscité une réaction tant du public que de la presse. Ses images associent des visages humains et des réalités nuancées à un groupe de personnes que les politiciens et les médias dénigrent avec désinvolture en les qualifiant de « sous-classes de brigands ».
Des décennies plus tard, Easton revint sur le projet et essaya de trouver la famille avec la simple intention de partager ses images originales et de remplir les années qui suivirent. Quand il les a trouvés, leurs situations actuelles ont porté des échos du passé. Les deux générations ont été touchées par l’insécurité du logement et la dépendance à un système de protection sociale labyrinthique qui a conduit à une nature précaire de l’existence. La différence essentielle est que, dans les années 1990, c’est le chômage qui a causé des difficultés, alors qu’aujourd’hui, dans les années 2020, la plupart des membres de la famille travaillent et sont encore confrontés à des difficultés financières similaires.
Le lien originel d’Easton avec la famille et la confiance qu’ils avaient en lui avaient persisté. Il a commencé à leur rendre visite régulièrement, à se rendre au supermarché, à traîner dans leur salon, à assister à des mariages et à assister à des moments de crise et de résolution. Ses récentes photographies, combinées avec les premières images, créent un portrait de la privation dans la Grande-Bretagne moderne et du décalage continu entre les décideurs politiques et les citoyens les plus pauvres.
« Ce qui est ressorti de ce projet est une perspective intensément personnelle à travers laquelle on peut voir une urgence sociale généralisée : la persistance de la pauvreté dans l’un des pays les plus riches de la terre et les façons insidieuses dont elle se reproduit au fil des générations. »
Les photographies du livre sont combinées avec des citations de la famille juxtaposées à celles de politiciens. On parle souvent de familles comme celle des Williams, mais on les écoute rarement, et leurs paroles et leurs expériences révèlent les contradictions et les fausses promesses des dirigeants. Les « enfants » du titre du livre ne se réfèrent pas seulement à la famille présentée dans les photographies, mais aussi aux politiciens et à la société en général qui sont tous influencés ou impactés par de vaines aspirations de « mobilité sociale ». L’influence de la pensée et de la politique politiques des années 1980 – et le slogan de Mme Thatcher, « Il n’y a pas d’alternative » – est encore omniprésente. Le projet d’Easton remet en question son acceptation.
Thatcher’s Children, a long-term project by photographer Craig Easton, examines the intergenerational nature of poverty as experienced by three generations of the Williams family in the north of England. The passage of time shown in the book demonstrates how deprivation is connected to the social policy failures of successive governments.
Thatcher’s Children was born out of a series first made in 1992 focusing on two parents and six children living in a hostel for homeless families in Blackpool, England. The project was made in response to a speech by Peter Lilley, then Secretary of State for Social Security, in which he announced his determination to ‘close down the something-for-nothing society.’ French newspaper Libération dispatched a journalist to northern England to find out what this society looked like, and Easton was commissioned to take the accompanying photographs. His resulting monochrome images of the overcrowded two-bedroom council flat in Blackpool sparked a reaction by both the public and the press. His images attached human faces and nuanced realities to a group of people casually maligned by politicians and media as an ‘underclass of scroungers.’
Decades later Easton revisited the project and tried to find the family with the simple intention of sharing his original images and to fill in the intervening years. When he found them, their current situations carried echoes of the past. Both generations were impacted by housing insecurity and dependence on a labyrinthine welfare system which led to a precarious nature of existence. The vital difference is that in the 1990s it was unemployment that led to hardship, whereas now in the 2020s most of the family are in work and yet are still confronted by similar financial challenges.
Easton’s original connection with the family, and their trust of him, had endured. He began to visit them regularly, taking trips to the supermarket, hanging out in their living rooms, attending weddings and witnessing moments of crisis and resolution. His recent photographs, combined with the early images, create a portrait of deprivation in modern Britain and of the ongoing disconnect between policy makers and poorer citizens.
‘What has emerged from that project is an intensely personal lens through which to view a widespread social emergency: the persistence of poverty in one of the wealthiest countries on earth and the insidious ways in which it gets reproduced down the generations.’ Jack Shenker
The photographs in the book are combined with quotes from the family juxtaposed with those from politicians. Families like the Williams’ are often talked about but rarely listened to, and their words and experiences expose the contradictions and false promises by those in power. The ‘children’ of the book’s title refer not only to the family featured in the photographs, but also the politicians and wider society who are all influenced or impacted by empty aspirations of ‘social mobility.’ The influence of the political thought and policy, from the 1980s—and Thatcher’s slogan, ‘There is no alternative’—still pervades. Easton’s project challenges the acceptance of this.