[…] “Des garçons dans une jungle traversent une semi-clairière, ils sont six. Entre eux, partout les entourant, une végétation bruissante ; à mesure que l’on s’y enfonce, un vert moite, assourdissant jusqu’au silence. Le premier des six s’oublie dans un avant-plan sombre, seuls resplendissent, pépites de lumière sur sa peau noire, une boucle d’oreille et des ongles blancs, à l’unisson de son vêtement. Le dernier lui, disparaît derrière les fumées blanches d’un feu qui couve, plus loin. Ils sont seuls ensemble, leurs regards lient l’un à l’autre sans jamais s’échanger, leurs esprits déjà partis dans un ailleurs qu’il leur faut encore rejoindre.
Encore la terre, couverte d’un tapis de mousse et d’herbes rompues et sèches. Des arbustes échevelés. Et deux hommes, l’un à demi couché, l’autre plus loin, debout, de dos. Un ciel presque absent et une végétation serrée. Des taches bleues : la bâche en plastique sur laquelle l’homme se tient, le manteau de l’autre, et un parapluie à demi-ouvert là-bas à l’arrière-plan, avec d’autres vêtements en boule. L’un guette, l’autre hésite, les deux maintenus dans la pénombre des branchages. Lui a dormi là sur la bâche, peut-être l’autre aussi. Dans la « jungle » de Calais ou sur les bords du Tibre ou… Taire le récit.” […] -Extrait du texte de Raphaëlle Stopin
“Ma recherche photographique porte sur la relation entre l’individu et le lieu. Celle-ci s’articule autour d’une tension sur laquelle repose la construction de mes photographies. Je cherche à établirun équilibre fragile qui peut faire basculer l’image vers quelque chose d’ambiguë, à la fois intrigantet énigmatique. L’interaction entre la figure et le lieu, l’inscription de l’individu dans un environne-ment précis déterminent ainsi la conception de mes images.Pour chaque mise en scène, je tente de créer une atmosphère singulière et captivante qui accorderaà l’image une dynamique propre affirmant son autonomie. La lumière naturelle enveloppe les modè-les joue du clair obscur et du contre jour, effleure le vêtement, convoquant tour à tour le champ pic-tural ou cinématographique. Les lieux que je choisis, les décors que je constitue sont sobres, intem-porels et minimalistes, me permettant de focaliser l’attention sur le sujet.” -Laura Henno
En collaboration avec : le Château d’Eau, Toulouse ; la galerie Le Lieu, Lorient ; Image/imatge, Orthez ; le Centre Photographique d’Ile-de-France, Pontault-Combault ; l’Artothèque, Vitré ; l’Artothèque du réseau des médiathèques de La Roche-sur-Yon Agglomération ; le Centre Régional de la Photographie du Nord Pas-de-Calais, Douchy-les-Mines ; le Pavillon Vendôme, Clichy ; la galerie Les filles du calvaire, Paris
Laura Henno (née en 1976) est une photographe française. Elle vit et travaille à Lille. Après avoir étudié la photographie à l’Ecole Nationale Supérieure des Arts Visuels de La Cambre à Bruxelles, elle intègre le Studio National des Arts Contemporains du Fresnoy pour y poursuivre son travail photographique et y réalise un premier film court en 2003. Elle travaille également au sein du collectif d’artistes Qubo Gas. En 2007, elle reçoit le Prix Découverte des Rencontres d’Arles.