Christine Ollier : Tu as longtemps travaillé comme “photographe documentaire” à travers le monde en étant représenté par l’agence VU’. Mais, en réalité, tu as toujours choisi tes sujets plutôt que tu n’as exécuté des commandes. Dès le départ, tu t’inscris dans une démarche d’auteur au lieu de réaliser des images documentaires ou de presse.
Guillaume Zuili : Bien sûr, il y a une démarche d’auteur, même si à l’époque je n’en avais pas vraiment conscience. D’ailleurs, si Christian Caujolle m’a fait entrer chez VU’, c’était déjà en raison de mon style personnel. J’ai très vite délaissé l’aspect documentaire pour construire mon monde. Je crée des films à travers mon regard, plus que je ne traduis le réel tel que tout le monde peut le voir. Mes techniques d’expression m’aident à y parvenir. Les surimpressions ont été la première porte ouverte pour quitter la réalité, travailler dans le laboratoire, explorer ma vision.
Guillaume Zuili : J’ai d’abord eu le grand avantage de ne pas être un inconnu car j’avais passé trois mois dans le Perche. Le tissu relationnel qui s’est créé pendant cette résidence a été le point de départ de cette nouvelle campagne photographique. Sans, cela aurait été difficile et très long. C’est ce premier réseau amical qui a ouvert la porte des autres, de leurs amis, voisins, etc. Ils m’ont donné leur confiance. Ils se sont engagés pour moi auprès d’habitants qui, ne me connaissant pas, m’ont tout de même ouvert leur porte. Ce n’est pas rien de leur part. J’ai rencontré une très belle humanité chez des personnes absolument pas habituées à être photographiées. Certaines étaient gênées, par pudeur ou timidité, d’être prises en photo et de livrer leur univers mais elles s’y sont pliées. D’autre étaient ravies et en redemandaient. Et parfois, des habitants qui avaient accepté au moment de passer à l’acte, s’y refusaient.
Né en France en 1965, Guillaume Zuili vit à Los Angeles où il vient d’obtenir la nationalité américaine. Photographe de l’agence VU’, il travaille en Inde entre 1986 à 1995 et publie en 2003 son premier livre Pondichéry, Chandernagor, Mahé, Karibal et Yanaon aux éditions du Chêne.
À partir de 1996, son œuvre photographique se dessine, et questionne la complexité des villes européennes à travers l’Histoire. En s’intéressant à la technique de la double exposition, il documente Berlin, Moscou, Paris, Prague et Lisbonne, avec un style qui se détache déjà du réalisme.