Tomber en disgrâce, s’endormir, tomber enceinte, tomber en ligne ou s’effondrer : la chute est un acte à la fois comique et tragique, plein de perte et d’abandon volontaire, un acte répété tout au long de notre vie. Réfléchissant à des situations personnelles de deuil et à une nouvelle vie, la chorégraphie de chute de Gabby Laurent est un espace d’auto-réflexion, permettant à son corps de céder à plusieurs reprises à la gravité et de créer un espace visuel pour contempler le temps, le destin et les circonstances.
Qu’est-ce que tomber ? Le vocabulaire idiomatique sur lequel Laurent s’appuie suggère un échec quelconque, un manque de contrôle et de sang-froid, que nous sommes amenés à croire comme inféminins et inconvenants. S’appuyant sur le langage visuel des pratiques artistiques féministes et performatives, Falling explore un abandon de la maîtrise de soi et l’acceptation du destin. Cependant, creusez plus profondément et nous découvrons qu’il y a un élément contradictoire dans les images de Laurent; car si la chute est essentiellement accidentelle, alors les performances subversives et intentionnelles de Laurent capturent un moment de contrôle, plutôt que la perte de celui-ci.
Il y a une séquence saisissante de photographies montrant l’artiste se levant de manière précaire d’un ensemble de blocs de départ alors qu’elle était très enceinte. Il y a les chaussettes qui glissent omniprésentes dans les escaliers et la chute dramatique d’un vélo. D’autres moments plus petits capturent le corps de Laurent en pure chute libre, suspendu dans une toile photographique de grain et de flou, libéré du paysage. Différents moments et gestes sont inversés, enchevêtrés, répétés ou contredits au sein des séquences saccadées et brisées du livre, nous invitant à considérer notre rapport aux différentes expériences quotidiennes qui nous submergent et suscitent des réactions – une procession vacillante d’émotions à la Muybridge. Et les états d’esprit. Chaque geste suscite la même réponse du spectateur – le souffle brusque lorsque nous assistons à la chute d’un étranger dans la rue. Mais plus que de simples échecs comiques, l’œuvre de Laurent représente également un geste de défi, car l’artiste se relève et se dépoussière inévitablement ; photos en n.b. et en couleurs.
Publié à l’occasion de l’exposition à la Webber Gallery (Londres) du 10 au 19 Juin 2021.
Accompanying exhibition at Webber, 10–19 June 2021.
A fall from grace, falling asleep, falling pregnant, falling in-line or falling apart: falling is an act both comic and tragic, full of loss and wilful abandon, an act repeated throughout our lives. Reflecting on personal situations of bereavement and new life, Gabby Laurent’s performed choreography of falling is a space for self-reflection, allowing her body to repeatedly give way to gravity and create a visual space to contemplate time, fate and circumstance.
What is it to fall? The idiomatic vocabulary Laurent draws on suggests a failure of some kind, a lack of control and composure, which we are led to believe is unwomanly and unbecoming. Drawing on the visual language of feminist and performative art practices, Falling explores an abandoning of self-control and embracing of fate. However, dig deeper and we discover there is a contradictory element to Laurent’s images; for if falling is essentially accidental, then Laurent’s subversive and intentional performances capture a moment of control, rather than the loss of it.
There is a striking sequence of photographs featuring the artist precariously rising from a set of starting blocks whilst heavily pregnant. There are the ubiquitous slipping socks on the stairs, and the dramatic fall from a bicycle. Other, smaller moments capture Laurent’s body in pure free-fall, suspended within a photographic web of grain and blur, liberated from the landscape. Different moments and gestures are reversed, intermeshed, repeated or contradicted within the staccato, broken sequences of the book, inviting us to consider our relationship to the different daily experiences that wash over us and elicit reactions – a flickering, Muybridge-esque procession of emotions and states of mind. Each gesture elicits the same viewer response – the sharp draw of breath when we witness a stranger fall in the street. But more than simply comical acts of failure, Laurent’s work equally represents a gesture of defiance, as the artist inevitably picks herself up and dusts herself off.